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Les tristes «salles de l’amour»

PHOTO MARTIN ALARIE

Écrit par : Martin Ayotte

Le fléau de la violence conjugale est si présent que deux salles d’audience du palais de justice de Montréal doivent être entièrement consacrées à la gestion de ces délicats dossiers.

Avec une certaine amertume et non sans ironie, on les appelle les « salles de l’amour » dans le jargon judiciaire. Dans les salles 6.11 et 6.07 sont traités tous les dossiers de violence conjugale de la métropole. Elles roulent cinq jours par semaine, à longueur d’année.


« Nous, on appelle même ça l’étage de l’amour », a lancé un des constables spéciaux chargés de faire régner la paix au 6e étage du palais de justice de Montréal, où tous les dossiers intrafamiliaux sont entendus.

L’atmosphère peut parfois y être tendue, voire explosive.

Dans le corridor, une dizaine de personnes, surtout des hommes, attendent que leur nom soit appelé dans l’interphone pour se présenter devant un juge. Certains fixent leur cellulaire, d’autres font les cent pas. Un homme, l’air impatient, tape du pied en regardant sa montre.

Se battre pour les victimes

Dans une salle, un accusé vient de se faire remettre à sa place par un juge qui refuse de l’acquitter et se dirige l’air irrité vers la sortie en maugréant des injures et en gesticulant.

« Parfois, ça peut être mouvementé, on peut assister à des crises. On voit ça régulièrement, des accusés sortir en colère. J’ai aussi déjà vu des victimes se pointer, faire une scène pour qu’on retire leur plainte », résume Me Isabelle Charles, procureure aux poursuites criminelles et pénales au sein de l’équipe spécialisée dans les dossiers de violence conjugale à Montréal.


Des victimes réfractaires à témoigner, qui changent d’idée souvent et veulent faire retirer leur plainte pour faire acquitter leur conjoint violent, c’est un défi quotidien avec lequel les 12 procureurs de la Couronne chargés de ces dossiers à Montréal doivent négocier.

« On se bat pour les victimes, même quand elles ne veulent pas. Nous, ce qu’on veut, c’est assurer leur sécurité avant tout », expose
Me Charles.

Même si on les incite fortement à témoigner, jamais on va les forcer.

Lien de confiance

« Je dois garder un lien de confiance avec une victime. Pour que, si elle est à nouveau en danger, elle appelle les policiers plutôt que de se taire en craignant la suite des procédures », explique Me Charles.

« Dans un cas de vol qualifié, l’agresseur ne connaît pas la victime. Dans nos dossiers, oui. Il sait où elle habite, connaît sa routine », dit-elle.

C’est pourquoi les dossiers de violence conjugale sont traités différemment. D’abord, c’est le même procureur qui va suivre un dossier jusqu’à la fin. Un suivi psychosocial est aussi systématiquement effectué par l’organisme Côté Cour auprès des victimes.

« De concert avec une intervenante, on va évaluer le risque, s’informer sur les besoins de la victime, évaluer le danger qu’elle risque. L’organisme peut aussi la référer à une maison d’hébergement », explique Me Charles.

4000 DOSSIERS DE VIOLENCE PAR ANNÉE
« Le féminicide, c’est la phobie de tout procureur qui s’occupe de violence conjugale », lance Me Christopher Chartrand Hadjis.

Comme plusieurs, les procureurs de la Couronne responsables de ces dossiers sont choqués de voir que depuis le début de l’année, sept femmes ont été tuées dans un contexte conjugal.

Dès qu’elle apprend aux nouvelles qu’une femme a été tuée des mains de son conjoint, sa collègue Isabelle Charles dit s’empresser de vérifier si cela est lié à un de ses dossiers.

Surcharge de travail

Près de 4000 dossiers de violence conjugale sont ouverts chaque année à Montréal selon des données du ministère de la Justice. En 2020, la majorité des dossiers ont été reportés pendant les trois premiers mois de la pandémie. Un an plus tard, le retard se fait encore sentir.

« La surcharge augmente les délais entre les dates de cour. Cela peut décourager une victime, effriter le lien de confiance avec le procureur », s’inquiète Me Pascal Dostaler, procureur en chef adjoint à Montréal.

« La corde est tendue à son maximum. Ça nous inquiète. Il ne faudrait pas qu’on en échappe », avertit Me Charles.

Selon Me Dostaler, il faudrait nommer plus de procureurs et utiliser d’autres salles pour régler ces dossiers.

En attendant, les procureurs ont à cœur la sécurité des victimes et déploient les moyens nécessaires, mais surtout accessibles, assure-t-il.

Parce que si une victime refuse de témoigner, l’acquittement reste souvent la seule option. À moins d’une preuve indépendante, comme des témoins. Mais même eux sont parfois réfractaires à témoigner.

« La violence conjugale, c’est l’affaire de tout le monde », insiste Me Charles.

Malgré tout, si une femme veut retirer sa plainte, le dossier ne sera pas automatiquement fermé. « Souvent on va attendre. Selon où elle se trouve dans le cycle de violence, cela va changer sa façon d’agir », dit-elle.

Pendant ce temps, cela leur permet de faire un suivi avec la victime. Ce filet de sécurité prime, surtout sachant que dans les cas de violence conjugale, la détention de l’agresseur est l’exception, selon la jurisprudence.

D’autres outils

Et si la condamnation n’est pas possible, il reste une solution : un engagement de garder la paix, aussi appelé un « 810 ». « Le 810 est souvent critiqué. Mais c’est parfois notre seul outil », défend Me Chartrand Hadjis.

Il rappelle que l’important est aussi de mettre un frein au cycle de violence. Et parfois, le simple fait que des accusations soient déposées contre l’agresseur va changer la vie des victimes.  

 

 

Source : Journal de Montréal │ Valérie Gonthier




Dernière mise-à-jour de l'article : Dimanche 28 mars 2021 à 07:10:15

Écrit par : Martin Ayotte



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